La sortie du Rwanda de la CEEAC est un signal d'alarme pour les blocs régionaux
La décision prise le week-end dernier par le Rwanda de quitter la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC) n'est pas seulement une manœuvre diplomatique ; c'est un rappel brutal que les organisations régionales doivent vivre selon les principes qu'elles proclament.
Le retrait de Kigali, déclenché entre autres par le fait d'avoir été écarté de la présidence tournante de la CEEAC en raison d'une campagne de haine menée par la République démocratique du Congo, met en lumière une réalité troublante : même au sein de forums prétendument égalitaires, les jeux de pouvoir peuvent l'emporter sur l'équité et l'adhésion aux principes.
Un bloc régional doit être ancré dans la transparence, le respect de son traité et l'égalité entre ses membres. Lorsqu'un État - qu'il s'agisse de la République démocratique du Congo ou d'un autre - peut manipuler les processus ou mettre les autres à l'écart, la légitimité du bloc s'effrite.
L'adhésion du Rwanda à la CEEAC (au début des années 1980), suivie de sa réintégration en 2016, visait à renforcer les liens économiques et politiques en Afrique centrale. Pourtant, au cours de la décennie écoulée, la CEEAC a à peine figuré sur le radar de la politique étrangère du Rwanda.
L'absence quasi-totale d'initiatives de coopération visibles, de projets conjoints ou d'engagements publics, malgré l'engagement du Rwanda, soulève de sérieuses questions quant à la pertinence et à la capacité de l'organisation.
Avant d'adhérer à de tels organismes, le gouvernement doit se poser des questions essentielles :
Les principes de l'organisation sont-ils appliqués de manière cohérente ? Chaque membre est-il traité sur un pied d'égalité ? Le Rwanda en tirera-t-il des avantages significatifs, qu'il s'agisse de coopération en matière de commerce et de sécurité, d'infrastructures ou d'influence régionale ?
Le retrait de Kigali est donc une mesure prudente, et non pétulante. Il souligne la nécessité d'un examen rigoureux avant d'engager le capital national - diplomatique, économique et de réputation - dans des projets régionaux.
Dans le sillage de la sortie du Rwanda, la CEEAC doit procéder à une profonde introspection : s'engager à nouveau en faveur d'une rotation inclusive du leadership, respecter la charte fondatrice et revitaliser son agenda avec des résultats qui résonnent sur le terrain.
Les États membres devraient également convenir de mécanismes formels pour résoudre les différends et prévenir l'influence unilatérale.
Entre-temps, le Rwanda et d'autres États devraient donner la priorité à l'adhésion ou au retour dans les blocs qui font preuve d'une véritable égalité, d'une cohérence opérationnelle et d'avantages tangibles pour les citoyens.
Si la CEEAC peut se réformer et se réaffirmer en tant qu'institution crédible, le départ du Rwanda pourrait être le catalyseur d'une revigoration.
Mais si les machinations de certains membres se poursuivent sans contrôle, la décision de Kigali envoie un message clair : la coopération régionale ne doit pas être simplement symbolique. Elle doit fonctionner pour tous ses membres dans l'intérêt collectif.
Cet article a été publié à l'origine sur New Times.